Chronique politique de Firmin Teko-Agbo : L’héritage d’Obama aux Africains

0
489

D’Accra à Addis-Abéba en passant par le Caire, Barack Obama a laissé le plus prestigieux des héritages à Faure Gnassingbé et à ses « frères et amis » qui continuent de s’accrocher au Pouvoir. Le Noir a montré à ses frères Noirs la voie à suivre pour pouvoir construire la démocratie et assurer le développement de leurs pays. A Lomé, on semble ne rien percevoir puisqu’on continue de réfléchir sur la limitation du mandat présidentiel même après avoir passé plus de 10 ans au Pouvoir et surtout avec la mise en place d’une commission ( chargée de réfléchir sur les réformes politiques) non consensuelle et bien partisane. A Kinshassa, on ne laisse toujours pas transparaitre sa volonté de quitter le Pouvoir même si on vient de mettre fin à une série de dialogue avec la bénédiction Vaticane. Et à Lunda, on essaie de jouer au népotisme. Des Dirigeants Africains qui s’obstinent à s’arque- bouter au Pouvoir et à en jouir comme le leur commande leur esprit.

La réplique est fort surprenante ! En juin 2016, le Président Togolais met en exergue sa volonté de ne pas quitter le Pouvoir. Du moins pour le moment. Faure Gnassingbé affirmait au micro d’une chaine allemande qu’il était toujours en train de réfléchir par rapport à la limitation du mandat présidentiel. Il répondait ainsi à Barack Obama qui s’exprimait sur le sujet un an plutôt. Nous sommes en Juillet 2015. Le Président Américain devant l’Union Africaine s’adresse aux Dirigeants Africains : « Personne ne devrait être président à vie ». Faure Gnassingbé du Togo qui venait de faire 10 ans au Pouvoir, Joseph Kabila qui venait de faire 14 ans au Pouvoir, Jose Eduardo Santos qui faisait déjà 36 ans de règne, Paul Biya Biya qui faisait déjà plus de 30 ans à la tête du Cameroun l’ont écouté. Et ce qui parait fort étonnant, c’est que tous ces dirigeants en plus du Brazzavillois N’guesso et autres chantent régulièrement la démocratie dans leurs discours. Et Obama leur répond encore : « Les progrès démocratiques sont en danger quand les dirigeants refusent de se retirer une fois leur mandat terminé.. Si je me représentais, je pense même que je pourrais gagner. Mais je ne peux pas.. ». La démocratie en danger donc avec ces dirigeants qui s’accrochent au pouvoir. Ils diront peut-être que leurs Constitutions ne limitent nullement le mandat présidentiel. Aux Etats-Unis, la Constitution ne limite pas non plus le mandat présidentiel. Il ya une coutume constitutionnelle qui oblige les Dirigeants à ne faire que 2 mandats au Pouvoir. Le Pouvoir étant un bien public et n’appartenant ni à un clan, ni à une ethnie ni à une famille, le Chef de l’Etat devra le quitter après les deux mandats et donner la chance à ses autres concitoyens de se positionner aussi. Cela ne semble rien dire à Faure Gnassingbé du Togo. Il est déjà à son troisième mandat. Il tend vers le 4ème. Et rien ne laisse présager qu’il quittera le Pouvoir en 2020. La preuve. Il dit réfléchir sur la limitation du mandat présidentiel. Il parle d’enjeux de Pouvoir. Et l’extraordinaire de ce début d’année, il nomme les Membres d’une Commission chargée de réfléchir sur les réformes constitutionnelles et institutionnelles. Une Commission non consensuelle et laissée dans le vague en ce qui concerne la temporalité. On n’y retrouve nullement des acteurs de l’opposition et les travaux de la Commission ne seront soumis à aucun délai. Ladite Commission peut prendre jusqu’à 5 ans pour son travail. Faure Gnassingbé toujours président. Puisque les conditions sont toujours bien réunies pour qu’il gagne toujours les élections. Au Congo démocratique, on fait trainer les choses pour rester le plus longtemps possible au Pouvoir. Au Cameroun, à Brazzaville ou à Hararé, on n’a aucune date précise par rapport au départ de ces dictateurs du Pouvoir.

Ces phrases de Barack Obama devant l’Union Africaine constituent un de ces trois héritages que les Africains devraient garder et y travailler. En Y travaillant, on ferait respecter les règles de la Res Publica, la Chose publique pour tous Où tout le monde aurait les mêmes chances devant le jeu électoral. Mais Ces Dirigeants qui continuent de s’accrocher au Pouvoir en font abstraction.

Deuxième Héritage de Barack Obama aux Dirigeants Africains, Accra , « Des Institutions fortes, clé du succès »

Juillet 2009. Devant le Parlement Ghanéen Obama lâche le mot. Des Institutions fortes. Il s’exprimait tout en faisant, sans nul doute, allusion au Colonel Kadhafi de la Lybie qui était toujours vivant, au Tunisien Ben Ali, à Paul Biya, à Sassou N’guesso, à Eduardo Santos mais aussi à Jospeh Kabila et au Régime Togolais. Un Régime qui venait de faire 42 ans au Pouvoir. Le papa qui meurt à 69 ans avec 38 passés à la tête du pays et qui laisse le Pouvoir à son Fils Faure. Le papa Eyadéma a dirigé sans partage avec une main forte en mettant toutes les Institutions à son service, y compris l’Armée. La preuve. La dictature bien pesante sous lui. Le fils qui arrive au Pouvoir suite à la mort du papa maintient la dynamique. Il contrôle toutes les Institutions de la République. Il contrôle la Cour Constitutionnelle, la Commission Electorale Nationale Indépendante, la Cour des Comptes, les finances du pays, les sociétés d’Etat. Une « minorité s’accapare les richesses du pays ». Les grosses boites sont dirigées par les militants du Régime. Les BTP en sont des exemples. Le Fils Faure a fait plus de milliardaires en un si peu de temps que son père. Ses copines très riches. L’Ancienne Directrice des Impôts en est une parfaite illustration. Les femmes de son père étaient moins visibles de son temps. Le contraire chez le Jeune Gnassingbé. Le Jeune contrôle tout. Il n’en fait pas sien l’héritage de Barack Obama. « En ce XXIème siècle, des Institutions capables, fiables et transparentes, capables et fiables sont la clé du succès. Des parlements puissants, des forces de police honnêtes et des juges indépendants ». Et pourtant il prétend créer un Togo économiquement assis alors que les richesses du pays sont contrôlées par lui et par la minorité dont il a une fois fait mention dans un de ses célèbres discours. «Aucun pays ne peut créer de richesse si ces dirigeants exploitent l’économie pour s’enrichir personnellement » lançait le Locataire de la Maison Blanche avant d’ajouter « Aucune entreprise ne veut investir dans un pays où le gouvernement se taille une part de 20% ou dans lequel le Chef de l’Autorité portuaire est corrompu. Personne ne peut vivre dans une société où la règle de droit cède à la place à la loi du plus fort et à la corruption. Ce n’est pas de la démocratie. Ce n’est pas de la démocratie. C’est de la tyrannie même si de temps en temps on y sème une élection ça et là, et il est temps que ce type de gouvernement disparaisse. » L’héritage de Barack Obama aux Dirigeants Africains. Avec ce discours, on peut développer facilement développer le Continent noir. Mais si on en fait fie, difficile pour le Togo et ses pays frères de décoller. Difficile de faire développer le Togo dans de telles conditions. On aurait suivi Obama , on aurait des institutions déverrouillées, la transparence dans la gestion des affaires publiques, la reddition des comptes, les richesses du pays équitablement réparties et le pays aurait accès à des milliards qui vont et qui continuent de se diriger vers les poches de cette minorité. Avec ces milliards de FCFA, on financerait énormément les politiques publiques, les initiatives privées. Plus de richesses, plus d’emplois, moins de frustrations, moins de corruption, moins de pauvreté et plus de croissance.

En s’appropriant ce discours Accra, tous les dirigeants Africains devraient faire rapatrier leurs milliards de dollars qui dorment dans les banques occidentales et les mettre à la disposition de leurs pays. Eduardo Santos avec ses 31 milliards de dollars, Obiang Guema avec ses 600 millions de dollars, Kabila avec ses 250 millions de dollars pourraient changer le visage de leurs pays respectifs.

Ces pays en plus du Togo sont-ils une démocratie ? Négative ! Ils ont juste trempé leurs orteils dans le fleuve de la démocratie.

Caire, troisième Héritage de Barack Obama pour les Africains : Education, innovation et la possibilité de créer un monde nouveau…

Depuis quelques années, les dirigeants Africains affichent toute leur volonté de construire des Etats Emergents. Ils se seraient inspirés du discours du Président Américain de Juin 2009 au Caire en Egypte. « Nous avons le pouvoir de faire le monde que nous voulons.. ». Les Africains ont le pouvoir de construire le monde qu’ils veulent. Ils peuvent faire de leurs pays des Etats émergents s’ils le souhaitent vivement. Il leur suffirait simplement de mettre un accent sur certains critères dont une économie diversifiée, une croissance potentielle (5% sur de longues années), et une démographie jeune (une population beaucoup plus jeune et bien éduquée et bien formée). Mais ces critères sont loin d’être respectés par les Dirigeants Africains. En parlant d’une population bien formée, on fait allusion à l’éducation sans laquelle aucun développement ne serait possible. Obama disait à ce sujet « Nous devons tous reconnaitre que l’éducation et l’innovation seront la monnaie du XXIème siècle. Il y a sous-investissement dans ce secteur ». Au Togo, on néglige le secteur et pourtant, Faure Gnassingbé le Président de la République et son Gouvernement prétendent à l’émergence. Un Ministre des Enseignements primaires et secondaires qui tâtonne sur le sujet et un Ministre des Enseignements Supérieurs moins ambitieux en ce qui concerne le Monde universitaire et un Président de la République très passif. Le discours Caire, cet héritage Obama pourrait servir à développer le continent noir.

Qui peut avec tout ce tableau clamer haut et fort que l’Ancien Président des Etats-Unis n’a rien fait pour le Continent Noir ? Ou les Africains s’attendaient à ce qu’il débarque à Addis-Abéba avec des centaines de mallettes et commencent par leur distribuer des milliers de dollars. Impossible. Il apprend à pécher. Même si quelque fois il se montre un peu plus généreux. 2014. A l’occasion du sommet US-AFRICA Business Forum organisé aux Etats-unis, Obama a mobilisé 33 milliards de dollars pour le Continent Noir. « Les Etats-Unis investissent massivement sur le long terme en Afrique » disait l’Ancien homme le plus puissant de la Planète, il y a de cela plus de 2 ans. Obama n’a-t-il rien fait pour l’Afrique ?

Il a donné la clé du succès au Continent. Aux Dirigeants et au Peuple d’ouvrir les portes fermées.

Messieurs les Présidents, le Pouvoir est un bien public. Tout le monde y a droit.

Firmin Teko-Agbo, journaliste-Chroniqueur politique.

icilome.com